mardi, janvier 23, 2007

EMB : "Mohamed Boulif est innocent"

"Dans le cadre de l'enquête relative à la gestion de l'ancienne EMB, à la demande de l'actuel président de l'Exécutif des musulmans de Belgique, un inventaire du matériel informatique a été réalisé en comparaison avec la facture mise en cause en présence du responsable de la société SGI S.C R.L « fournisseur de matériel informatique à l'époque de l'EMB ». L'Exécutif tient donc à confirmer sur base de l'inventaire établit ce jour, le 22/01/2007 que le matériel informatique correspondant à la facture sue mentionnée est bien présent dans les locaux de l'EMB", écrit Coskun Beyazgül (Président de l'EMB) dans un communiqué de presse.

Ce lundi (22/01/07) de 14h00 à 17h30, les membres de l'EMB (Coskun Beyazgül, Kissi Benjelloul, un secrétaire et un informaticien) ont vérifié et photographié en présence du représentant de la société SGI chaque numéro de série du matériel informatique disponible dans les locaux de l'institution. Objectif principal de cette démarche : établir un nouvel inventaire officiel pour venir en aide à Mohamed Boulif, l'ex-président de l'EMB (2003-2005), en détention préventive à la prison de Forest depuis le 16/01/07 pour abus de confiance et détournement de fonds. Objectif secondaire : calmer la tension qui règne au sein de la communauté musulmane depuis l'arrestation de Mohamed Boulif en prouvant la bonne volonté et la parfaite collaboration de l'actuel Exécutif dans ce dossier.

"Mohamed Boulif reste confiant pour la poursuite de l'enquête. Un peu dépassé par les événements, il est persuadé de son innocence et ne comprend pas l'injustice qui le touche. Il remercie tout le monde pour les différents soutiens écrits. Ils peuvent avoir une grande influence dans la poursuite de l'enquête. Ces lettres, l'inventaire ainsi que le communiqué de presse de l'EMB ont été transmis à son avocat qui les a remis au juge d'instruction. Il attend tous les jours sa libération", explique un membre de la famille ayant rendu visite à Mohamed Boulif.

De son côté, l'actuel vice-président de l'EMB joue aujourd'hui la carte de l'apaisement et du rassemblement après des années de vives oppositions dans la gestion du culte musulman. Extrait d'un entretien musclé avec celui qu'on présente comme le mouton noir de l'actuel Exécutif des musulmans de Belgique : Kissi Benjelloul...


MK : Etes-vous fier d'avoir réussi à mettre Mohamed Boulif en prison ?
Kissi Benjelloul : Ce n'est pas moi qui l’ai mis en prison. C'est une enquête qui date de 2003 donc d'avant notre arrivée à l'Exécutif. Je ne suis évidemment pas content car à titre personnel je ne souhaite qu'une seule chose : c'est que mon frère Mohamed Boulif puisse sortir le plus vite possible de cette tragédie... pas seulement pour Mohamed Boulif... mais pour notre communauté musulmane tout entière... et mes pensées se dirigent vers ses amis et sa famille...
MK : Pourtant, vous n'avez pas vraiment aidé votre "frère" pendant cette enquête. Je me souviens encore de l'époque où vous étiez membre de l'assemblée générale des musulmans de Belgique où vous avez sorti des documents comptables pour dénoncer votre "frère" Mohamed Boulif en l'accusant d'avoir détourné des fonds publics. Ce sont des accusations graves.
Kissi Benjelloul : Je n'ai pas dit qu'il avait détourné des fonds. En tant que membre de l'assemblée générale, j'ai demandé des éclaircissements sur ses comptes à travers une lettre. Il m'a également répondu par une lettre un peu méchante mais je le pardonne. Je le pardonne car avant tout c'est mon frère et je n'ai jamais eu de rancune envers lui. C'est un garçon honnête que je respecte. Il était toujours très gentil et très serviable. On a même travaillé ensemble contre les putschistes de l'époque. Pour moi, Mohamed Boulif est innocent. Ce n'est pas l'habitude de ce garçon de détourner des fonds publics.

MK : Laurette Onkelinx (PS) a porté plainte quand même, non ?
Kissi Benjelloul : Non, c’est à cause des députés qui lui ont posé des questions. Alors, elle ne sait pas répondre si elle ne demande pas des comptes...
MK : Est-ce pour se protéger contre ces méchants parlementaires qui posent des questions que la ministre Laurette Onkelinx a été obligée de porter plainte auprès du juge ?
Kissi Benjelloul : Elle a été obligée à cause de l’interpellation de Denis Ducarme [MR]. Regardez et lisez ce courrier envoyé par madame la ministre au député.
MK : C'est bien sur plainte de Laurette Onkelinx que le juge Claise a ouvert le dossier contre Mohamed Boulif, non ?
Kissi Benjelloul : Parce qu’elle a été interpellé… Non, c’est à cause de Denis Ducarme qui a interpellé la ministre à mon sujet.

MK : Montrez-moi cette lettre.
Kissi Benjelloul : Tenez et lisez la réponse de la ministre suite à l’interpellation de Monsieur Ducarme…

MK
: Si je lis bien, Laurette Onkelinx (PS) écrit : (…) « Le nouvel Exécutif des Musulmans de Belgique a, en effet, dû faire face à un passif très lourd, un manque de transparence total dans la gestion laissée par l’ancien Exécutif. C’est à ma demande que le Parquet de Bruxelles a été saisi de ce dossier qui est actuellement en cours d’instruction. » (…)
Kissi Benjelloul : C’est une plainte ou pas ?
MK : C’est une plainte contre l’ancien Exécutif auprès du Parquet de Bruxelles.
Kissi Benjelloul : C’est suite à une question posée à la ministre et elle devait y répondre. Parce que lui [Denis Ducarme], il nous interpelle aussi ce type-là. Il vient chez nous ici et il nous pose des questions. Pourquoi-ci ? Pourquoi-ça ?
MK : Il fait son boulot de député...
Kissi Benjelloul : C’est bien, c'est son droit mais il doit quand même dire la vérité.

MK
: Pour apaiser les tensions au sein de la communauté musulmane, accepteriez-vous de faire un pas de côté ? Par exemple, vous mettre en congé de la vice-présidence de l’Exécutif ?
Kissi Benjelloul : Non, c’est ma fierté aussi.

MK
: Et la fierté de Mohamed Boulif ?
Kissi Benjelloul : Je suis avec lui et j’espère qu’il sortira le plus vite possible. Je fais tout mon possible pour l’aider. C’est à notre demande que le représentant de la société SGI est venu aujourd’hui à l’Exécutif pour vérifier le matériel. Il faut le soutenir et essayer de prouver l’innocence du frère.
MK : Vous refusez de faire un pas de côté pour calmer les tensions au sein de la communauté musulmane…
Kissi Benjelloul : Parce que je n’ai fait que du bien.
MK : Tout le monde pense l’inverse.
Kissi Benjelloul : A cause des médias et des journalistes. Vous pouvez venir avec moi sur le terrain et vous verrez que beaucoup de musulmans me soutiennent contrairement à ce que les médias racontent. Prouvez-moi que les musulmans pensent l'inverse !
MK : A votre mosquée à Saint-Gilles, on m'explique que vous auriez détourné des fonds destinés à aider la Palestine...
Kissi Benjelloul : Ce n’est pas vrai que j’ai détourné l’argent d’une récolte pour la Palestine. Alors, les journaux publient ma photo en m’accusant mais ce n’est pas vrai ! Quand je suis auditionné par un juge, on parle de moi dans les médias mais quand je suis blanchi, personne ne rectifie l'information. C’est une campagne de diffamation à mon égard. Je suis à l’Exécutif pour réaliser des projets et la communauté musulmane m’a élu pour que je réalise ces projets…

MK : Avec 363 voix de préférence, il est difficile de croire que vous représentez grand chose...
Kissi Benjelloul : C’est le premier score à Bruxelles.
MK : Dans votre catégorie de « Marocains » peut-être mais sans la catégorisation ethnique, vous n'auriez jamais pu siéger à l'assemblée générale des musulmans...
Kissi Benjelloul : C'est votre avis. Il y a des cooptés qui n’ont même pas une seule voix. Il y a par exemple 27 cooptés dans l’assemblée générale [ndlr : il n'y a aucun coopté depuis les dernières élections musulmanes]. Généralement, on coopte les gens pour leurs compétences. Où sont ces compétences ? Je ne les vois pas. Il faut m’interroger sur le travail que nous faisons à l’Exécutif depuis notre arrivée et pas venir avec des mensonges dans les médias en publiant ma photo ou en me traitant de crapule. Mais je vais mettre un terme à tout cela. J’ai tout remis à mes avocats et au moindre dérapage sur moi, je vais tout de suite faire intervenir mes avocats. Que me reproche la communauté musulmane ? On a redressé la situation en payant tout le passif. Toutes les dettes ont été payées !

MK
: C’est plus facile quand on a les subsides, n'est-ce pas ?
Kissi Benjelloul : Oui mais je ne parle pas seulement de 2005 mais aussi des dettes des années 2004, 2003, 2002, 2001 et 2000. Tout le passif ! Or, le subside est accordé pour un budget bien déterminé. Nous n’avons plus un franc de dette aujourd'hui. Nous avons même payé le précompte immobilier de l’année 2000, les dettes de l’ONSS, les arriérés de loyer et les dettes de personnes. Nous avons apuré toutes les dettes de l’institution… Vous comprenez ?

MK
: Et la dette de 80.000 euros contractée par l’ancien Exécutif, via l’asbl "Gestion de l’Exécutif des musulmans de Belgique", vous ne voulez pas la payer ?
Kissi Benjelloul : Ecoutez, ce n’est pas nous qui commandons…

MK
: Qui commande l’Exécutif ?
Kissi Benjelloul : Nous n'avons reçu qu'un subside pour l’année 2005…
MK : Allez-vous "oui" ou "non" payer la dette de 80.000 euros empruntée en 2004 par l’ancien Exécutif pour payer les salaires et les factures de téléphone de l’institution parce que la ministre Laurette Onkelinx avait bloqué tous les subsides ?
Kissi Benjelloul : Non, ce n’est pas comme ça. Ecoutez, nous n’avons qu’un budget pour 2005 et nous ne pouvons pas l'utiliser pour les années précédentes.
MK : Mais vous venez de me dire que vous aviez même payé le précompte immobilier de l’année 2000 ainsi que les dettes de l’année 2004, 2003, 2002, 2001 et 2000.
Kissi Benjelloul : … Normalement, on ne le fait pas. Mais comme nous avions tout le temps des huissiers devant la porte, nous avons décidé de payer ces dettes. Ce n’est pas nous qui disons "oui" ou "non", c’est l’administration et la Cour des comptes.

MK
: Donc c’est "non" pour la dette de 80.000 euros ?
Kissi Benjelloul : Avons-nous reçu un budget pour l’année 2004 ? Non ! Avons-nous reçu un budget pour l’année 2003 ? Non ! Nous n’avons reçu qu’un budget pour l’année 2005…

MK
: Avez-vous reçu un budget pour l’année 2000 ? Non! Pourquoi avez-vous payé le précompte immobilier de l’année 2000 ?
Kissi Benjelloul : Ce sont des dettes de l’institution.

MK
: Tout comme les 80.000 euros empruntés par l’ancien Exécutif, non ?
Kissi Benjelloul : Mais, cela n’entre pas vraiment dans le subside. Il faut que l’ancienne équipe prouve à la Cour des comptes que l’argent emprunté a bien servi aux dépenses de l’Exécutif. Si après, la Cour nous dit qu’il faut payer, nous les payerons dès demain ! Si les pièces justificatives prouvent que l’argent a bien été utilisé correctement, il n’y aura aucun problème.

MK
: Pourtant, vous êtes impliqués dans une procédure judiciaire sur ce dossier où l’association « Gestion de l’EMB » créé par l’Exécutif Boulif affronte votre association « Gestion des finances de l’EMB » …
Coskun Beyazgül : Si vous me permettez de répondre... L’affaire ne porte pas sur l’emprunt mais sur les statuts d’une association qui a les mêmes objets que l’Exécutif des musulmans de Belgique. Chacun est évidemment libre d’avoir son association mais si l’objet social d’une asbl est exactement le même que l’EMB, cela risque de semer la confusion. Ce sont des associations parasites qui sèment la confusion. C’est la même chose avec le Conseil fédéral des musulmans de Belgique. Ils ont carrément repris le même objet social que l’Exécutif des musulmans de Belgique donné par un arrêté royal. Mais la procédure judiciaire évoquée n’a aucun rapport avec les 80.000 euros…
MK : Le prêt a été contracté par l’association Gestion de l’EMB et l’Exécutif actuel a créé sa propre association pour éviter de payer cette dette... Pour revenir à l'arrestation de Mohamed Boulif, s'il y a effectivement eu des malversations dans l'ancien Exécutif, c'est l'ensemble de l’Exécutif qui devrait en rendre compte et pas seulement son président, non ?
Coskun Beyazgül : Vous n'êtes pas le seul à vous posez cette question. On ne comprend pas non plus la raison de cette seule inculpation. Effectivement, c’est la gestion de toute une équipe. Malheureusement, nous ne savons pas ce qui est en train de se passer et c'est vrai que c'est la gestion de toute une équipe. Monsieur Boulif est actuellement dans cette situation difficile. L'affaire est pour l'instant en instruction mais vous pouvez être certain que nous sommes prêts à collaborer et fournir tous les éléments justificatifs possibles pour terminer l'enquête.

MK : Vous adoptez maintenant un ton apaisant alors que dans la presse, on n'arrête pas de lire que « les successeurs » ne trouvent plus les ordinateurs livrés par la société SGI.
Kissi Benjelloul : Nous n'avons jamais dit cela ! Jamais !
Coskun Beyazgül : Vous savez, l’affaire décolle tellement vite et c’est vraiment n’importe quoi. Nous n’avons jamais dit que le matériel était introuvable ou qu’il n’était pas à l’Exécutif. Dès que le juge d'instruction est arrivé sur place, nous lui avons remis tous les documents demandés. Nous avons pleinement collaboré avec les enquêteurs. Je ne sais pas ce que nous pouvions encore faire d’autre. Je ne comprends pas comment certains journalistes, qui ne se donnent même pas la peine de nous contacter, peuvent ensuite écrire que nous ne trouvons pas le matériel. Les rumeurs et les lettres anonymes vont tellement vite que nous n’avons pas le temps de réagir à tout. Nous espérons qu'une seule chose, c'est d'en finir avec ces histoires. Que les médias arrêtent de jetter de l'huile sur le feu sans cesse.