mercredi, octobre 03, 2007

Molenbeek et sa mosquée bleue pakistanaise

Aujourd'hui (02/10/07), j'ai été prier au Centre islamisque pakistanais (CIPA) à Molenbeek, un lieu de culte dirigé par le puissant homme d'affaires ixellois d'origine pakistanaise Wassim Akhtar. L'intéressé a batti sa fortune avec la société Eastway (grossiste en alimentation) le long du canal ainsi que des investissements immobiliers gérés par son épouse. Bien que politiquement Wassim soit le représentant belge du Pakistan People's Parti (PPP, parti membre de l'Internationale socialiste et dirigé par Benazir Bhutto), il roule en Belgique pour le parti libéral (MR) vu son statut d'indépendant ou de businessman. Ainsi, à 3 semaines des dernières élections communales (2006), un repas a été offert par un candidat libéral à 60 fidèles de la mosquée pour "expliquer" le vote et "informer" les électeurs d'origine pakistanaise sur le système électoral belge.

Précision importante, valable aussi pour les autres lieux de culte visités, les fidèles d'une mosquée ne partagent pas nécessairement les préférences électorales de chaque dirigeant administratif. Le Centre islamique pakistanais se trouve au numéro 22 de la rue des Ateliers à Molenbeek, en bordure du canal et à deux pas des bâtiments de la Communauté française.

Dès l'entrée, on se trouve dans une belle salle aux ablutions avec une série de sièges en bois fixés sur le carrelage blanc. Le lieu est propre et bien entretenu contrairement aux toilettes qui se trouvent à la droite de cette salle. Il faut immédiatement se déchausser et ranger ses chaussures dans les belles étagères à droite, puis prendre ses ablutions à l'aide des savons multicolores et se diriger vers la porte en face donnant sur les salles à prières. Avant d'ouvrir la porte, vous avez encore le temps de passer un dernier coup de fil ou de consulter les panneaux pour effectuer un don au profit d'une organisation caritative islamique, on ne sait jamais ce qui pourrait vous arriver...

Dès l'entrée dans la salle des prières, il est d'usage ici de se couvrir la tête en mettant un petit chapeau (qui ressemble à une kipa) disponible sur votre droite, de saluer timidement l'assemblée et prendre votre place en vous alignant selon les motifs du tapis bleu. Je n'ose plus faire de rapprochement entre la couleur du tapis et les préférences politiques des administrateurs. Un effort a visiblement été fait en matière de décoration, on retrouve même sur la gauche une grande indication numérique de l'heure en plus de la classique horloge de marque "Champion" indiquant le temps dans la plupart des lieux saints.

Contrairement aux autres mosquées arabophones ou turcophones, il n'y a pas eu de discours vers 21h00 car les fidèles révisent silencieusement dans leur coin pour débarquer aux environs de 22h00 à l'heure de la prière collective. Une deuxième salle se trouve à l'étage et une cuisine commune au grenier pour les fidèles qui rompent le jeûne sur place. Avec l'aimable invitation de quelques Pachtounes, j'ai pu prendre le thé en écoutant quelques envolées lyriques dans leur langue locale qui diffère apparemment des langues officielles du pays (urdu et anglais). Ainsi tous les Pakistanais ne parlent pas nécessairement la même langue et la langue véhiculaire est soit l'urdu, soit l'anglais. Puis, chacun m'a parlé un peu de sa propre région et, si j'ai bien compris, le Pakistan est divisé en 4 provinces (Penjab, Sind, Baloutchistan, et Serhad) ainsi qu'une entité dénommée "Azad Cachemire" qui est au Pakistan ce que la République turque de Chypre Nord est à la Turquie : une fiction méga-militarisée. Mais bon, mieux vaut ne pas faire ce genre de commentaire. Politiquement, vous ne risquez pas grand chose si vous émettez autour d'un thé des opinions hostiles au général Pervez Musharraf au pouvoir actuellement au Pakistan suite à un coup d'Etat militaire mais évitez d'entrer plus dans le détail du monde politique pakistanais.

Le jeune imam "Adnan" (la trentaine) d'origine pakistanaise parle couramment le français et l'arabe. Il a même, semble-t-il, un grade particulier pour ses connaissances théologiques mais je n'ai pas bien capté la dénomination exacte de son titre (hafiz?). La prière se lit, comme ailleurs, en arabe classique mais il arrive parfois que l'imam fournisse un petit résumé en urdu. Attention, l'accompagnement de l'imam par des reprises d'"ammiiiinnn" est beaucoup plus silencieux dans cette mosquée. Alors qu'ailleurs, tout le monde reprend avec force le refrain 'ammiiinn' après l'évocation du "darling", ici les fidèles se contentent de mini-"amin" afin de ne pas trop brusquer le rythme de la prière. Mini-amin pour maxi-prière car ces cycles m'ont paru curieusement plus longs qu'ailleurs, à moins que ce soit l'effet de la fatigue...