Guantanamo : le joker Lizin de la Belgique ?
Débat le 20 mai 2005 organisé par la régionale Ecolo à Saint-Josse avec pour thème de discussion : les prisonniers de Guantanamo. Alors que la petite quinzaine de personnes entrent dans la salle, les invités prennent place derrière la table verte : le président de la Ligue francophone des droits de lHomme Dan Van Raemdonck, Françoise Dieryck dAmnesty International, la députée écologiste Zoé Genot avec comme modérateur le conseiller communal forestois Ahmed Amani.
Le débat na pas encore débuté que le banc arrière plonge dans détranges réflexions sur base des derniers sujets dactualité :
« - Le cabinet Kir (Propreté publique) a convoqué des membres de l'Exécutif des musulmans pour pouvoir organiser le prochain abattage rituel de l'Aïd (cf. grosse polémique la fois dernière sur les "conteneurs piégés" avec amende à l'arrivée). Le cabinet ne veut plus faire d'erreurs et a prévu deux grands centres d'abattage où ils comptent tuer 3.000 moutons que la presse sera obligé de qualifier de "massacres" tant qu'une juridiction ad hoc n'aura pas qualifié les faits incriminés autrement (rires). Par ailleurs, si la proposition du sénateur Jean-Marie De Decker (VLD) passe, on sera forcé d'assommer le mouton avant de l'égorger, vous vous rendez compte ?
- Oui et attention, il ne faut pas se tromper en faisant l'inverse. Je vois déjà certains égorger le mouton et puis l'assommer juste pour se conformer à la loi a posteriori... Le pire, j'ai lu que cette pratique était déjà pratiquée afin de ne pas faire souffrir la bête.
- Euh... tu égorges la bête et tu veux ne pas la faire souffrir, t'es gentil toi !
- Mais non, je t'assure, si tu suis scrupuleusement l'abattage rituel musulman, le mouton ne souffre pas.
- Mais il souffre tellement qu'il meurt !
- Oui mais sans souffrir... »
Retour au débat de la soirée avec le rappel de la situation internationale par Ahmed Amani qui cède ensuite la parole à Dan Van Raemdonck. Toujours très à laise dans la prise de parole, le président de la Ligue des droits de lHomme aborde lhistorique des recours introduits par les avocats américains et les vides juridiques concernant la base américaine de Guantanamo. « Après un certain temps, les Américains ont préféré renvoyer les prisonniers dans les pays où des techniques dinterrogatoire à torture sont dapplication. Ainsi, ils ne torturent pas eux-mêmes directement mais remettent les prisonniers aux mains des autorités de pays pratiquant la torture, ce qui est totalement contraire aux conventions internationales ! »
Suivant le dossier de manière très pointue pour le compte dAmnesty international, Françoise Dieryck explique les conditions de détention des prisonniers. Il faut savoir que toute information est couverte par le secret défense américain de sorte quil est très difficile davoir des données officielles. Mais par exemple le témoignage dun agent de la FBI fait état de conditions déplorables avec des détenus enfermés dans des pièces surchauffées ou totalement froides. Lune des personnes sétait littéralement arrachée un par un ses cheveux sous leffet de la chaleur. Pas dinfrastructure adéquate de détention, beaucoup avaient même fait leurs besoins sur eux et les multiples méthodes dhumiliation sont pratiquées par les interrogateurs américains. »
La députée fédérale Zoé Genot a fait le point sur lactivité du gouvernement belge et de lassemblée où elle siège sur ce dossier. « La position du gouvernement belge a dabord été très molle vis-à-vis des Américains notamment en raison de la détention de deux ressortissants belges à Guantanamo. Au total, quatre missions belges se sont rendues dans la base de Guantanamo mais nous navons pu obtenir aucun compte rendu. Lattitude était justement de ne pas froisser le gouvernement américain afin de faciliter la libération de nos ressortissants. Par ailleurs, le chef de file chrétien-démocrate à la Chambre, Pieter De Crem, fait état lors dune interpellation dun accord signé qui existerait entre la Belgique et les Etats-Unis stipulant la promesse dune condamnation pour terrorisme contre les deux détenus belges en échange de leur remise à la Belgique. Mais plus généralement, on peut se demander encore ce que nous pouvons faire à notre niveau dans ce dossier complexe denvergure internationale. »
La députée ny a peut-être pas encore pensé mais une piste typiquement belge existe pourtant et qui ne demande quà être testée au niveau international. La présidente du Sénat, Anne-Marie Lizin, par ailleurs représentante spéciale de lOSCE à Guantanamo, ne pourrait-elle pas tout simplement envoyer une lettre en sa qualité de bourgmestre de Huy à lattention dun juge américain pour lui demander de venir en aide à un simple prisonnier ? Ne pourrait-elle pas suggérer à George W. Bush une consultation populaire parmi les résidents de Guantanamo ? De toute façon, en cas déchec, le président Bush pourra toujours invoquer une nouvelle pratique socialiste comme la « jurisprudence Lizin » pour balayer lavis de la population.
Même pas le temps dy réfléchir sérieusement que lanimateur de la plate-forme Vigilance Musulmane, Abdelghani Ben Moussa, partage la dernière dépêche de lagence Reuters en direct de son ordinateur portable connecté au réseau internet. Ben Moussa pose également une question pertinente pour les ressortissants belges libérés : « Quels sont les recours possibles pour ces personnes détenus sans jugement depuis 2001 ? Peuvent-ils introduire une plainte en Belgique pour réclamer des dédommagements ? » Une question quil faudra sans doute évaluer au regard de la loi sur la compétence universelle comme le signale Dan Van Raemdonck tout en suggérant un renvoi aux juridictions américaines.
Une « illuminée proche de Dieu » prendra ensuite la parole dans la salle pour préciser que « George Bush est un être humain [réponse dans la salle : « Ben Laden aussi ! »] et quil est possible de linfluencer comme la déjà fait Nathan Chtcharanski ». Influencer George Bush daccord mais faut-il encore savoir dans quel sens
[mehmet]
voir : http://www.minorites.org/article.php?IDA=9129
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